lundi 25 juin 2012

DAYDREAMING


 (Le paradis, c’est juste après le feu, à gauche)




 AGENDA

Pendant que le reste du monde planche sur la crise – une légion de cancres laborieux et stériles qui ne réussissent qu’à plonger Wall Street dans le blues -  en France, on a du travail.

On va abolir la nature humaine.

Deux muses éclairent la voie : l’une à la Justice, radieuse comme un astre.  L’autre au Droit des Femmes, grave comme un prophète.

Le gouvernement bosse ardemment, sous le bon sourire de Lui Président.

Il s’agit de mettre la planète en ordre – les banquises au freezer, la finance sur le gril,  les chefs d’état au pas, le sexe dans les slips.

Bientôt, on se retrouvera tous en bermudas dans le Jardin de l’Eden, sous le sourire lumineux de Devinez Qui.




ÉVOLUTION

Nous sommes au 21ème siècle.  Le ridicule ne tue plus.  Il épanouit – jusqu’à l’obésité intellectuelle. 




THE SOUND OF MUSIC

Le printemps arabe poursuit son éclosion.  Tout le monde est en fleurs et en félicitations.  J’ai l’impression d’entendre du Vivaldi.




 FATUM

Je parlais avec Martine – une brillante, une redoutable, qui a vécu plusieurs vies violentes.  Dont une au moyen âge, devant Saint Jean d’Acre, où elle hachait les  infidèles en rondelles.

Elle disait : « Fatum – tu sais, le destin…  Je suis fataliste. »

Elle l’a dit avec un sourire dans la voix – comme les gens que la fatalité repose. 

Je n’étais pas d’accord.  Il y a un fatalisme agréable et pratique, qui consiste à voyager léger dans la vie, débarrassé de toute responsabilité de soi.  C’était écrit – on  sait pas où, peut-être dans le sable ou dans les nuages.  En tout cas, on a une feuille de route - que l’on n’a même pas besoin de lire.

Et il y a un fatalisme fervent, qui est presque celui de la foi. Ces fatalistes-là avancent seuls, contre vents et marées, avec une bravoure de templiers.

Ce qui flambe en eux, c’est le respect du destin.

Martine est de ceux-là.

A la fin, il faut rendre à César ce qui lui appartient.  Même si, depuis le 6 mai, il est recommandé de faire le contraire.




LE RÊVE FRANÇAIS

Les américains retardent, avec leur amour du succès.  En France, on ne perd pas de temps.   Lui Président s’est occupé de « réenchanter » les choses.

Le rêve français, dûment ciré et emballé, vient d’entrer au musée Grévin, avec une étiquette flamboyante :  Réussite Interdite (sous peine de crachats, de fisc et d’exil).




LES FOULES  

Que ce soit place Tahrir ou place de la Bastille le 6 mai - des visions inouïes de foules déferlent sur les écrans.  Des tsunamis humains qui se coagulent en nappes pulsantes ou grondantes aux quatre coins de la terre.

J’ai le souffle coupé.  Je traduis : des trillions de spermatozoïdes prêts à charger, des galaxies d’ovaires en pleine forme. 

The clock is ticking.

Que va-t-il rester des arbres, des poissons, du ciel ? Combien d’égorgés dans les assiettes ?  Il n’y aura plus une touffe d’herbe intacte.  Plus une seconde de silence nulle part.  Même le vent ne pourra plus traverser une rue.

La planète va pencher comme la tour de Pise.
































































samedi 23 juin 2012

L'ÉCUME D'UN JOUR



500 LIGNES

Angela Merkel a 500 lignes à faire :

« Je sors de mon aveuglement idéologique - Je sors de mon aveuglement idéologique - Je sors de mon aveuglement idéologique…. »

Quant aux renégats qui surnagent dans l’UMP, traînant derrière eux leurs valeurs ringardes  et leurs alliances nauséabondes – ceux-là sont virés.

Ferme, inlassable, messianique -  et noble dans les climats funèbres  -  Lui Président fend la mer Rose, tel une figure de proue .

Angela reste au piquet.



DANI CHERCHE UN APPARTEMENT

Dani court ParIs.

Il va d’émerveillement en émerveillement. Il me décrit l’un des appartements qu’il a visité :

« Magnifique, mais vraiment  magnifique…  Les toilettes sont sous la télévision.  Ça a un charme Louis XIV, tu vois…..»

Un autre l’a enchanté :

«  C’est Austerlitz !  Tu as le soleil un quart d’heure tous les solstices d’été…  Tu te rends compte ?   D’ailleurs,  Austerlitz, c’est le nom de l’immeuble… »



MOODY WOODY

 Vu Midnight In Paris, que j’avais réussi à rater.

Woody Allen, un des plus grands nombrilistes actuels, doué, d’accord, drôle aussi, oui, oui, mais à qui je reste fermée – ce qui, je le sais est de la plus haute incorrection culturelle – a choisi un clone pour incarner le héros de Midnight in Paris.

Il balance dans sa nuit magique, entre les bars fumeux où discourt  Hemingway et les folles soirées charleston, une sorte de Woody Allen II, grand, blond, jeune et plutôt ahuri, qui est censé avoir les yeux tristes de l’unique Woody : « you have sad eyes «  - la réplique tourne en boucle dans les rues nocturnes.

Autour de lui, évidemment, s’agitent des humains préfabriqués et bavards.  Dans le  chahut de ces béotiens, le Woody blond promène, déstabilisé, son cœur en chamade, son amour de l’art  et son nez dépressif. 

Le film avait beaucoup de charme.   Mais, comme toujours, le nez de  Woody Allen  trempe dans son ego.

Comme dans une tasse de café.



L’ÉCUME D’UN JOUR

Posée un instant, last sunday, sur le rebord d’un fauteuil.  J’ai entendu ma voix.

Je chantais une ancienne chanson grecque : 

Eis ton aphro, eis ton aphro tis thalassas…  (mon amour dort dans l’écume de la mer – parakalo sas kimata… Vagues, je vous en prie, ne me le réveillez pas…)

J’ai vécu  en Grèce, il y a très longtemps - probablement à la fin du Mésozoîque.  La mer était d’un bleu fou.  J’ai connu un oursin martyr.  On respirait le vent jusqu’au vertige.  Les chats filaient sur l’échine des rochers comme des hors-la-loi.  Le soir, une houle de lauriers roses montait des jardins.  La nuit explosait de danses.  Les grecs chantaient à faire tomber les îles – dans l’écume de la mer.

 (yialo, yialo, piyénamé…).

J’avais les tempes aussi étoilées que si j’entendais du Bach.

Mon fauteuil voguait dans l’écume des mers.

Un extraordinaire anglais amer arpentait le début du siècle dernier.  Lui aussi, comme les grecs qui parlaient aux vagues, s’était attardé dans les chambres de la mer.  (Jusqu’à ce que  les voix humaines le réveillent.  Et le noient.)

Dérivant dans la demi brume du soir,  Apollinaire chante pour les murènes.  Les rues de Londres s’ouvrent devant lui comme la mer Rouge – tandis que des nageurs évanouis flottent le long de la  Voie Lactée. 

T. S. Eliot, errant dans les salons, se dit qu’il a le temps – il a le temps de se préparer un visage pour rencontrer les visages de rencontre.  Quand un regard le fixe dans une phrase convenue, il s’étale, écartelé sur une épingle.

Entre La Chanson du Mal-Aimé et The Love Song Of J. Alfred Prufrock,  je tanguais. 

J’ai entendu sombrer Apollinaire (« Mon coeur et ma tête se vident – Tout le ciel s’écoule par eux.… »).  Pendant que T.S. Eliot observait  l’intérieur d’une minute :

«  In a minute there is time
For decisions and revisions which a minute will reverse. »

Je suis revenue à terre.

Enfin, sur terre.

Je me suis dit que le premier son d’une voix trahissait tout – en particulier, la médiocrité.  Que c’était terrifiant.  Et qu’à entendre ce son, je pouvais me retrouver, comme Thomas S.  (T.S. Eliot), éventrée sur une épingle.

J’ai fumé une cigarette.

J’ai remarqué que nous vivions dans une société de viol – déboutonnés, verbeux, gesticulant -  rossés chaque jour par la banalité.  Mais je n’ai pas élaboré.

Après ce tour de chant et d’horizon, je suis allée voter.  Dehors, le soleil était féerique.  Il traînait jusque sous les arbres.  Le bureau de vote flottait dans une oasis de silence.

Il y a des jours qui prennent le large.





















dimanche 10 juin 2012

LES RUISSEAUX DE CHANAAN

 


CONFIDENCE DE DANI

Je craignais que Dani souffre de sa visite chez moi.  J’ai tendance à vivre comme un nomade, sur les tapis, depuis 6.000 ans – dans un vent de papiers  et, disons-le, quelques courants de poussière. 

Dani, heureux mortel, est marié à Noëmie – une personne racée, brillante et calme, qui ne permet pas à une poussière de lui polluer la vie.  J’étais vaguement mélancolique – il n’y a pas de Noëmie dans ma vie.  J’ai pataugé dans les comparaisons :

« Toi, tu comprends, tu vis dans un étincellement de propreté… »

Dani s’est exclamé, douloureux :

« Ne m’en parle pas !  Il y a tellement de poussière sur les tables de nuit que je ne peux même pas écrire dessus - Noëmie reconnaîtrait mon écriture… »

Nous sommes des gens inquiets.



Arènes Hurlantes

Autour des arènes où se jouent les matches, des foules tonitruantes, en séismes de passion  - on a gagné !  On a gagné !

Jerry Seinfeld, infernalement clair, disait :

« They wan.  You watched. »   (« Ils ont gagné.  Vous avez regardé. »).

La vie a horreur du vide.   Elle crie.




L’héroïsme des tiers 

C’était il y a très longtemps – les dinosaures venaient juste de disparaître.   Un médecin m’a fait des infiltrations dans l’épaule.  J’étais recroquevillée de douleur, il était gai comme un pinson. A  la fin, je l’ai félicité :

« Je suis très impressionnée, docteur, par votre héroïsme devant ma douleur…»

Il a ri.  C’était un valeureux.




 Sœur lumineuse

D’après le Hubble Space Telescope, et si j’ai bien compris l’information, dans 4 milliards d’années, notre galaxie va entrer en collision avec la galaxie Andromède – crash cosmique, mort des nageurs, explosion des soupirs et des blancs ruisseaux

à ceci près que dans environ 500 ans, il n’y aura plus que les fourmis qui brouteront les continents et règneront sur les océans

(« Voie lactée ô sœur lumineuse
Des blancs ruisseaux de Chanaan
Et des corps blancs des amoureuses
Nageurs morts suivrons-nous d’ahans
Ton cours vers d’autres nébuleuses » ?)



PANGÉE

Au début – enfin, bref, avant l’ordre majestueux lancé d’en haut à la lumière, avant la pomme fatale, le serpent stratège et les feuilles de vigne – avant la première éviction -  il n’y avait qu’un seul continent géant à la dérive sur l’eau planétaire : la Pangée.

Il y a 200 millions d’années, à la fin du Trias – probablement une ère de courants d’air – un hoquet a soulevé cette gigantesque masse de terre, qui s’est divisée en deux.  Plus tard, elle s’est disloquée définitivement, pour devenir l’échiquier que l’on connaît, entre guerres, tornades, smartphones et océans.

Well.  La Pangée se reforme. 

Ethnies mêlées, peuples en voyage,  repli de la mer Rouge, fatiguée de s’ouvrir - rafales de pub, verbiage général, chants de lynchage sur les places publiques, tsunamis, marchés en deuil – tweets ininterrompus, meurtres en vidéo, earthquakes, smartphones, neurasthénie sexuelle, extases nombriliques, les 3 quarts de l’humanité en gesticulation sur Facebook –

petits présidents gris, terrés dans leur grandeur légale, en larmes internationales de crocodile et en rôts de satisfaction secrète – forêts rasées, océans bouches d’égout, cadavres de tigres et de requins, caddies en pyramides, zigzaguant dans les temples de la grande distribution - pluies de sang, déluge de voix, orages d’images,  happy few, golden boys, SDFs, ménagères, roulements d’egos, vies digitales, vomissement de sourires à la télé,  débats caqueteurs - immensité divine du Net, qui s’ouvre à tous les mortels, répond à tous les croyants -

immensité sixtine. 

Le doigt de Dieu déclenche 7 milliards de langues. 

Il n’y aura bientôt plus qu’un fracas unique et  colossal entre les océans.

Pangée bis.




DESTINS

Il y a des gens qui ratent leur destin.  D’autres l’épousent.  Certains l’inventent.  Beaucoup n’en ont pas.  Et il y a des gens…

Il y a des gens qui volent leur destin.




DANI PARLE DES ROIS

J’expliquais à Dani que je ne pouvais pas ouvrir les fenêtres des deux côtés de l’appartement parce qu’il y aurait des courants d’air géants et que les vitres exploseraient. J’essayais de l’entraîner dans une conversation terrestre.

Nothing doing.

Dani – vibrant, comme toujours, des grandes questions du monde - s’est jeté sur le sujet.

Il m’a appris que dans la cathédrale Saint Denis il y avait tellement de courants d’air qu’on entendait des bruits creux, étranges : ploc ploc, flic floc…

J’étais mystifiée.  Il m’a regardée gravement et a répété avec force : « Ploc ploc, flic floc… »

Un grand pouvoir de persuasion intellectuelle émane de Dani.  L’explication s’est lentement fait jour dans mon esprit.  Saint Denis.  Les tombeaux des rois.

Ploc, ploc.

Le bruit des os royaux dans les tombes, claquant dans les courants d’air.

J’étais muette sur ma chaise, raflée par le souffle de l’Histoire. 

Dani est allé au bout de sa révélation :

« Et tu sais, on entend des voix sépulcrales… »

« Ah ? »

« Oui, vraiment…  Des voix d’outre tombe, qui crient… »

Il a achevé, immense, dans une clameur :

«  La porte !  LA PORTE ! »



















































samedi 9 juin 2012

IN INFOS VERITAS ?




Danses russes

Magnifique Russie, pleine d’ors et de fleuves

Russie folle, sanglante, chantante,  qui n’est jamais vaincue que par elle-même – avec, en tête, 2 stars des entrechats : Poutine-Medvedev - Medvedev-Poutine.  Un pas en arrière, un pas en avant, on reprend…

Le cygne de Tchaïkovski serait mort d’ennui.



 Prince-Premier

Si on devait concevoir un prototype du parfait premier ministre, ce serait Jean-Marc Ayrault.

Grand, belle stature, brushing neigeux sans un pli, régularité mathématique des traits,  œil bleu Frigidaire – la France est pâmée. 

C’est l’étalon-or, toutes nations confondues, du premier ministre tel qu’on le rêve.

C’est le Prince-Politique-Charmant.

Une statue vivante, bleutée de givre et de vertu.

J’ai entendu la statue parler – un peu comme le Commandeur  à l’instant de châtier le malheureux Don Juan coincé dans ses péchés.  Le Prince-Ministre - voix arctique - a dit en substance : « ici, on fait de la politique, on n’est pas au festival de Cannes… »

N’est pas prince qui veut.



DUO

 Vladimir Poutine : froid comme un concombre.  Et net comme une équation.

Lui Président : grésillant comme une sauce.  Et flou dans son costume.

N’empêche.  Monsieur Poutine n’est qu’un visage pâle à la tête d’une vague Russie.

Lui Président éclaire le monde.  Qui, sur la Planète aurait osé émettre une seule remarque positive dans l'enfer de la crise - avant que Lui Président apparaisse, illuminé de solutions,  comme un messie sur du gazon ?

  

Répétitions générales

« Concertation », « justice », « solide », « cohérent », « apaisé », « my taylor is rich » ( oh, pardon)...

Nous sommes gouvernés par du vocabulaire.



Les larmes d’Angela

Harlem Désir, toujours magnifiquement créatif, a observé l’autre jour qu’Angela Merkel était en plein désarroi.

Il a analysé cette détresse.  Angela a maintenant affaire à un président « fort ».  Avant, son interlocuteur était un président « faible ».

Fais gaffe, Angela. 

Accroche ton brushing.  On ne sait pas pour qui sont ces souffles socialistes qui  sifflent sur nos têtes.

vendredi 8 juin 2012

10 days


10 days noyée dans les post its et les notes volantes - sans pouvoir mettre le nez dans le blog

en plus, I am still a stranger dans Facebook

j'ai eu juste le temps de pondre un commentaire - enfin, un soupir d'exaspération - ce matin sur l'Iphone

comme je ne ne suis pas sûre que mon commentaire ait  été répercuté chez les quelques Facebook people que je connais et que je tiens à soupirer haut et clair sur leur mur - je répète :

Lui Président : je ne comprends pas - personne ne voit la petitesse satisfaite de cet homme, coiffé comme une théière de l'immense pourpre présidentielle?