mercredi 29 mai 2013

LA SORTIE DES TÉNÈBRES

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 (la Théorie des Genres)







  
le créationnisme est une pensée féconde, qui a fait des disciples fervents dans certaines classes sociales aux U.S.

selon ses théoriciens, la planète n'existe pas depuis 4 milliards 600 millions d'années,  comme le prétendent les escrocs de la science - qui se mêlent,  en outre, de dater le vague espace inintéressant autour de la terre à 15 milliards d'années

d’après eux, le monde tel nous le connaissons est né, en fait,  il y a  2013 ans

et le Big Bang est un sombre bobard

les paléontologues brumeux, les fétichistes qui se disent archéologues, les biochimistes d’occasion, les soi-disant astrophysiciens et autres lurons – tous les fouilleurs de ruines, les gratte-terre, les microscopes addicts, les hébétés devant un nuage et les psychotiques avec leur lunette fourrée dans les étoiles - sont des clowns dangereux

ainsi, les morceaux de vases, les poussière d'os et divers vieux cailloux qu'on pourrait trouver dans la terre datent au maximum de 2 millénaires

les pharaons d’Égypte ont probablement prospéré au Moyen Âge, les romains un peu avant Louis XIV et les philosophes grecs dans une période plus floue -  peut-être entre 1017 et 1802




en France, on est beaucoup plus créatif

le pays de la liberté ne tolère pas l'obscurantisme

on s'attaque  de plein fouet à un énorme et lamentable canular : le processus de la reproduction  - avec ses notions bornées et ses Implications catastrophiques sur l'humanité

en effet, tout acte de reproduction implique une donnée de base: la différence des sexes

please…  la différence des sexes !

une hérésie inventée par des néanderthaliens ou des australopithèques à l'esprit malade, et qui abêtit la race (pardon) humaine  depuis plus de 6 millions années

il était temps d'éclairer le monde et de ramener à la raison ses 7 milliards d'habitants

homme et femme sont identiques, à quelques détails (insignifiants) près  

c’est cette évidence que la Théorie des Genres va enfin rétablir

des milliers d'ignares, aveuglés par leurs convictions hétérosexuelles, vont évidemment s’accrocher désespérément à ces détails pour soutenir leur thèse débile de la dualité des sexes - un entêtement qui  dure depuis la chasse au mammouth, et au-delà (homo erectus)

mais les socialistes, dans leur ampleur de vues, rectifient enfin cette déviance de l’humanité

penseurs profonds et valeureux, intellects brillants,  il savent qu’il faut prendre le mal à la racine,  c'est-à-dire veiller sur les très jeunes enfants avant que leurs parents ne leur inculquent des vues  barbares, vieilles et usées comme le monde, sur la différence des sexes

rédempteurs, ils décrètent l'enseignement dans les écoles de la Théorie des Genres

une appellation pleine de tact, car il s'agit,  en fait,  d'une révélation, d’un fulgurant retour au réel – c’est à dire à la réalité du sexe unique

les enfants sauvés de la corruption parentale pourront ainsi faire  leur coming out pratiquement dès la maternelle




c'est la sortie des ténèbres

les hétérossexuels et leurs conceptions baveuses, obsolète, leurs penis envy et leur vagins bavards seront  bientôt marginalisés

c'est   leur tour

il est grand temps qu'ils récoltent, comme disaient les anglais au début du siècle, leur « comeuppance » - autrement dit ce qui leur pendait au nez,  pour ne pas dire ailleurs

aux harpies hétéros, maintenant, de faire la queue devant les maternités pendant que les hommes nouveaux, enfin rentrés dans leurs droits,  accoucheront dans une éprouvette

aux terroristes machos d'aller chercher des cafés et de faire des photocopies pour  les nouvelles amazones de la haute finance

…aux grandes marques de prêt à porter de laisser Abercrombie and Fitch ramper dans la poussière des musées - et de déchaîner leur créativité sur l'immense marché du One Sex Only





à pensée unique, sexe logique







précision à tout hasard :     



l'homosexualité ne m’a jamais posé de problème – elle est, pour moi, à sa manière,  l'expression d'une liberté sans laquelle on ne peut pas vivre



mais il y a des moments ou l'incontinence des imbéciles  et leurs solutions finales me suffoquent




dimanche 26 mai 2013

ILS





 (j'ai un nouvel ami qui m'a inspirée)

ils sont immenses d'âme, rayonnants de vertu, prodigues d'enseignements, élégamment économes d'humour, justement hautains envers le reste du monde

ils ont un amour sincère pour eux-mêmes et - sur le plan du stoïcisme devant le dénuement des autres (après leur passage), ils enterrent les spartiates

leur crâne aérien ne tolère que les idées fixes, ce qui leur épargne la vaine fatigue des luttes et des résultats

enfin, ils ont hissé la France à la position internationale enviable de clown de la planète

respect

mercredi 22 mai 2013

L'ÈRE DE LA PLUIE



Dani s'en  fout de la Voie Lactée

il dit que ce qui l'intéresse - et que,  selon lui, je devrais poster - ce sont  mes photos, mes dessins  (mes textes?)

il clame:  dessine!  fais des photos!

bon

je ne vais pas m'étendre  sur la réalité des choses - bien qu'il  soit vraiment facile et très courant de faire la  sieste sur les choses et la réalité en général

ah, tu veux des photos de moi?

voilà:  énième jour de l'ère de la pluie

une toute petite flamme frileuse au fond d'un verre rouge, une table posée sur le lac gris d'un trottoir

sur la table,  un reflet de ciel mouillé

à l'intérieur, autour d'une longue table de banquet,  un groupe de gens assis en rang et, à mon avis,  morts d'ennui,  écoute un discoureur ronronner  une litanie de mots ronflants extra ordinairement dépourvus de sens

je fume,  je traduis les courriers de Martine en anglais - et je photographie la pluie

hello Dani

enjoy






lundi 20 mai 2013

BERCEUSE







je tiens à dire

que je fais consciencieusement mon job dans Facebook - je suis concierge

concierge des posts:

pouce, pouce en l'air, bleu des mers du sud, tout de suite: j'aime, j'applaudis, je wow, je commente en long, en large, en profond et en subtil, avec des mots de luxe

tout le monde est content de moi - je reçois régulièrement plein de pourboires:

des petits soleils souriants, des lols, des parenthèses mouchetées et des pouces bienveillants qui m'accordent le droit d'exister - comme dans les arènes romaines

mais si, par hasard, je colle ne serait-ce qu'un post-it sur ma page

...juste pour dire par exemple "la concierge est dans l'escalier" ou "la concierge est allée poster une lettre"

je retrouve aussitôt mon post it flottant, désincarné, comme dans un tableau de Matisse - dans un tsunami du silence

j'ai écrit 3 lignes - et tous mes "amis"se sont évanouis

busy-busy-busy, ils buzzent ailleurs

ma page est plus reposante qu'un monastère

et aussi déserte que Mars

quoique... Mars a quand même Curiosity

Facebook, ce bus colossal, ultrasophistiqué, enflé de bourdonnements, qui roule en météore autour de la planète - zoome à 320.000 kilomètres lumière de clics, dans d'autres cieux

je reste vaguement perplexe, assise sur ma marche d'escalier, devant mon audience:

...mmm...zzz...mmm....zzz....zz...

concierge?

zzz...

sirène, plutôt

je chante, et tout le monde dort

...Fish are jumpin'
And the cotton is high?


zzz




mercredi 15 mai 2013

LYRICS FOR DANI




(je poste parfois sur Facebook un dessinateur grec dont je trouve l’humour enchanteur, je traduis les bulles - naturellement, dans une symphonique absence de réactions)





inquiet de mon bien-être sur Facebook,  Dani s'impatiente:

"comment veux-tu que ce truc en grec soit partagé?"

(mais je traduis, enfin...)

de toute façon, que ce soit en grec, en aztèque, en araméen, en français limpide ou en français BDCDM - que ce soit drôle, amer, brillant, politique, poétique, insolite ou autre...

c'est exactement pareil : je virevolte dans un vide sidéral

ceci dit

je déchiffre  maintenant avec une grande aisance les résonances de Facebook, ses lois  non écrites  - et les silences sous les trombes de mots

alors...

alors, je "partage" dans les courants d'air,  je danse dans le noir,  je dîne dans le vide - je m'en fous

j'ai un autre genre de problème,  beaucoup plus imminent,  à régler avec Facebook

d'ici  là,  si j'ai envie,  je balance des hiéroglyphes - l'inventaire  des rentrées de blé d'un secrétaire de Ramsès II

ou du latin, odio vulgum et arceo, ou de l'Apollinaire incendié - (dans ses yeux nageaient les sirènes
et nos baisers mordus sanglants
faisaient pleurer nos fées marraines) - ou  les solos  perplexes de T.S.  Eliot,  cloué par un regard dans les salons de Londres (shall I wear the bottom of my trousers rolled?)

who the hell cares?

et, comme disait mon père, perpétuellement interdit de séjour dans la vie de tu sais qui

comme disait mon père, errant, enchanté, entre microscope,  Golem, Talmud , Mendelssohn, Bergson Schopenhauer, aquarelles, pinceaux, nuits blanches et noires le long du piano ou violon follement enlacé sous le menton



...entre Max Bruch et Beethoven, et Maïmonides et Caïn (lorsque avec ses enfants vêtus de peaux de bêtes,
échevelé, livide au milieu des tempêtes, Caïn se fut enfui de devant Jéhovah...)

entre les chants en roumain, et la musique des langues, entre l'anglais, l'hébreu, le grec, l'allemand mythologique,  le merveilleux français et l'espagnol d'un ancêtre poète à Cordoue


...entre le vent dans les pins de Prinkipo,  les maisons en dentelles de bois, les mers noires et les mers de marbre,  les mélodies mélancoliques et dérisives du temps du pont de Galata (en tu ventana voy posar, taniendo mandoli-ino..)

entre les recherches biologiques de la rue de l'Hôtel  de Ville - cultures de bactéries dans l'eau d'un vase de fleurs,  sauvetage d'une guêpe en noyade dans du  jus d'orange, armées d'éprouvettes et inspection de gouttes arc en ciel aplaties sur des lamelles

...entre la colophane et le lac aux flancs déchirés   (l'année à peine a fini sa carrière. .. ô temps, suspends ton vol!)  

...comme disait mon père, capté, appelé par  des milliers d'univers -  au seul interlocuteur qu'il avait - c'est à dire moi:

"ce soir,  Lucullus dîne chez Lucullus..."

donc je dîne chez Lucullus quand je veux

et je reste avec les anges grecs

el Dio me va dar mucho bueno

ÜBERMENSCHEN






Abercrombie & Fitch : marque réservée aux sylphides, aux ravissantes fines comme des algues – et aux séducteurs tout neufs, tout frais de minceur et d’adrénaline

ces Abercrombie and Fitch ne  sussurent pas des trucs genre:

"Moches de ce monde, vous êtes des princes et l'écume des mers sculpte vos crinières d'or"

ou:

"Tromblons derrière un guichet, vous êtes des sirènes hautaines, éblouissantes et Paris s'évanouit à vos pieds"

Abercombie & co parlent clair:

si vous êtes jeune, mince, beau et bandant, vous entrez - tout le reste est out, dehors,  aux poubelles

(les gros et les obèses d’abord)


un discours applaudi  par toute la planète

icônes, artistes, héros, étoiles médiatiques, se bousculent dans les  temples people

ils éclosent comme des orchidées ou des volcans dans  le déluge d'images qui tombe des  réseaux sociaux

on les voit même sourire pâlement, astres flous et froissés sur les banquettes des métros - ou s'émietter dans les rues en traces luxueuses sur des lambeaux de journaux

ils vivent à des kilomètres fluos de nous

...une faune mordeuse, pailletée, insaisissable et somptueuse - à  sourire tombeur, charme infectieux,  jambes interminables, egos béants

des surhumains



in the world of fashion,  ils passent  en souverains

regards absents, minceur méprisante, démarche désarticulée et cous en périscopes pour les femmes  

sobres frétillements pour les hommes - souvent déguisés en poupées ou en porte-clés - mais qui demeurent incurablement beaux sous les jupes mâles  ou les épaulettes martiennes



les surhumains rayonnent dans  tous les mondes de ce monde

ils s'abattent comme des extraterrestres - en concert sur des scènes incendiées de lumière,  au bord d'arènes immenses,  battantes de foule

ils trépident sur leur micro en orgasme ininterrompu, implosent sur leur batterie, se  cassent, électrifiés, sur leur  guitare - tandis que les masses tanguent, s’affolent, en spasmes de passion

au  sortir des coulisses,  ils hachent à coup de coudes leur passage dans les hurlements,  les mains voraces  et  les évanouissements d'extase de leurs disciples - ils passent comme des comètes,  hâtifs , lunettés de noir jusqu'au yacht sur roues qui les engloutit


             les surhumains se savent divins

ils descendent sur  les tribunes politiques, flambants de gestes, la voix en échos du Mont Sinaï

ils orbitent frénétiquement autour des micros  - en costume photogénique ou en chemise fiévreuse,  décoiffés par le vent de l'Histoire

ils tonnent devant  des foules inflammables,  ivres de leur propre langage, scandant les serments -  prophètes autoproclamés, aspirants secrètement enragés  à toutes les voluptés du  pouvoir

tandis qu'ils s'époumonent  en clichés liturgiques,  en postillons et en bave d'amour - leur invisibles gueules de crocodiles trempées  de famine - les foules ondulent, hallucinées  

et  les acclamations montent comme des chants de damnés dans des villes en séisme   



les surhumains sont multiformes

ils  se répandent dans les pages des magazines, ruissellent  de crinières,  de seins, de slips en virgules, de fourreaux pailletés, de noeuds papillon - et de sourires entonnoirs sur des dents blanc banquise

in the show biz galaxy , ils naviguent, messianiques entre  les océans de piscines,  les Edens de marbre et  les Voies Lactées qui leur servent de trottoirs

ils étincellent brièvement dans une émission ou une soirée - puis se retirent dans leurs nébuleuses de palais, de ranches, de chevaux, d'îles turquoise et d'avions

certains d'entre eux siègent dans un 0lympe à part

comme  des comètes prévues par la NASA,  ils sont visibles  dans la nuit des Oscars

...des demi dieux, qui se déplacent lentement dans un ciel exclusif

les coupes de champagne voilent des regards amusés et las,  les brushing scintillent comme des étoiles

tandis que les intronisés sur scène sanglotent  des larmes de diamant, princiers dans leur blanc-noir de smoking - ou en  tornade échevelée  d'émotion et de haute couture

les stars sont devenues des religions

et les regards des abîmes



sur terre, on trotte d'un terrier à l'autre, inquiets comme des lémurs, les yeux et les oreilles violés du matin au soir

autistes,  on se  récite sans arrêt le même mantra: je suis libre de ceci de cela, de dire, de clamer, de gesticuler, de choisir, de refuser, de  décider, de ricaner, d'aimer, de haïr, de m'énerver, de consommer, de me garer, de tweeter, de coller quand je veux un soupir ou une photo de vacances sur Facebook -  je vis, je m'exprime et, comme disent les anglais,  le monde est mon huître - je suis libre

libre de filer doux sous un réseau de jougs

libre de vivre bouche bée sous la dictature de la  beauté

on est tellement libres qu'on pourrait presque marcher sur nos langues pendantes



dans les  rues, des hommes ciselés, à demi nus dans leur royaumes de verre, appellent d'autres hommes  - qui ne les toucheront  jamais et en pleureront dans leurs rêves

ils hantent les abris bus, narguent tous les gris et les crevés du quotidien - torses  finement musclés, lèvres plus charnues que des pivoines et plus éloquentes que des draps de lit, regards coulés, érotico-timides d'ados pervers

du côté des femmes,  c'est la guerre intégrale,  la lutte pour respirer

on reçoit en missiles, toutes les demi secondes un corps à tomber raide avec un infarctus, des courbes qui se  catapultent  dans les  rétines jusqu'à l’étourdissement

comme en ascension de l'Himalaya,  on arrive au sommet des corps, en nage, le souffle coupé

...avec des lunettes mentales de skieur - pour supporter la beauté inouïe du visage  qui vous explose au nez comme une couronne solaire

miraculeux, boréal, en affiches géantes




toujours le même visage, d'ailleurs - les yeux en ailes d’oiseau, bleu Pacifique ou roux d'Afrique

toujours le même message - qui vous recrute, vous déboutonne et vous recrache

les mêmes lèvres incendiaires, entrouvertes dans  la même perpétuelle moue d'invitation boudeuse

le même extraordinaire vide du regard sous la mèche qui transgresse

le même regard - infernalement

ce regard étiqueté qui dit:  I am a  sex goddess, vous avez intérêt à  ramper comme des larves pour faire frémir un seul de mes cils pulpeux

come to bed  - and go to hell - eyes




on patauge dans tous ces regards translucides, vacants,  où ne frissonne jamais une lueur d' humour

on erre perpétuellement sonnés, en état d’impotence, cernés par ces milliers de créatures fabuleuses surgies d’ailleurs

elles bondissent à chaque instant sous nos paupières - lionnes blondes ou noir nuit, l'oeil en fente d'amande et la bouche capable d'avaler une planète

les dissidentes mutent,  hantent  les mangas, s’agitent entre nos mains  - mammaires, ahuries, les  yeux en lac Ontario, les  bouches en têtes d'épingles et les croupes carnivores

mais les autres règnent

elles dévorent tout, les écrans,  les vies, les  pages ou  les murs - avec leur harassante,  interminable invitation à l'éblouissement, à l'érection, à l'exclusion, à la suffocation

à la vénération par le vide


Übermenschen